« Le coût de la reconstruction de la Syrie est estimé à 300 mrds$, cinq fois le PIB de 2010 », Osama Kadi, président du Groupe de Travail Economique Syrien
Le Groupe de Travail Economique Syrien, SETF, est un groupe de recherche économique qui joue un rôle de sensibilisation dans les conférences internationales, les ateliers et les médias, pour montrer l’ampleur de la crise économique historique et actuelle et la vision pour la future économie syrienne.
Entretien avec Osama Kadi lors de la conférence annuelle Femise (29-30 avril 2017 à Casablanca), où une centaine d’experts méditerranéens ont exprimé leur point de vue sur «Migration et crise des réfugiés dans l’UE-Med: l’aube d’une ère de responsabilité partagée?».
Comment la communauté internationale peut-elle se mobiliser pour arrêter la guerre en Syrie?
La nouvelle administration américaine est la seule force politique capable de poursuivre la négociation politique jusqu’à une phase sérieuse et briser le statu quo actuel dans les négociations politiques. Je crois que les prochaines négociations de Genève devraient façonner la phase finale de la résolution politique, car il semble que le discours politique américain ait changé depuis que M. Trump assume la présidence.
Depuis mars 2011, la guerre en Syrie a causé plus de 320 000 morts et le déplacement de millions de personnes. Quelles sont les démarches de la diaspora syrienne pour aider le pays à se remettre d’une telle tragédie humanitaire?
Malheureusement, les agences des Nations Unies ont distribué la plupart de l’assistance collectée (90%) qui a été recueillie par le biais de conférences de levées de fonds au régime syrien, au lieu de la donner directement aux Syriens opprimés. Le régime n’a permis aucune aide envers les dizaines de villes assiégées. De plus, il a bombardé à plusieurs reprises les cargaisons de l’ONU, d’autres secours de nombreuses agences internationales et a ciblé la destruction d’hôpitaux.
Par exemple, le matériel médical d’IRM, qui coûte 2-3 millions de dollars et a pris des mois de collecte de fonds par des Syriens, a été détruit par le régime en trente secondes.
« La reprise pourrait prendre 20 ans »
Quelle stratégie pour relever le défi et inciter les Syriens à reconstruire leur pays?
Nous croyons qu’il est nécessaire d’élaborer une stratégie approfondie sur des sujets tels que le commerce agricole, les industries agroalimentaires et l’écologie. En fait, les conflits durables peuvent accentuer l’impact négatif sur l’économie et les institutions et retarder la reprise. En supposant que la reconstruction de la Syrie commence en 2018 à une croissance de 4,5%, la reprise pourrait prendre vingt ans.
Si le ministère de la Défense du prochain gouvernement de transition peut collecter toutes les armes au moyen d’une politique intelligente, avec à la fois des incitations économiques et des pressions, et donc assurer un niveau de sécurité décent, alors je crois qu’avec un soutien international, l’économie syrienne pourrait croître à plus de 9%. Ainsi, le processus de reconstruction ne pourrait prendre que dix ans ou moins.
Le succès dans une reconstruction post-conflit dépend des progrès quasi-simultanés à accomplir sur quatre « piliers » : la sécurité, la justice et la réconciliation, le bien-être économique et social et la gouvernance et la participation.
L’économie syrienne fait face à d’énormes défis. Le coût de la reconstruction est estimé à 300 milliards de dollars, cinq fois le PIB de 2010; La pauvreté de masse, la destruction des services de santé et d’éducation, le déplacement à grande échelle des Syriens, la perte de capital humain, le faible niveau des réserves internationales, la destruction des infrastructures, l’amortissement accéléré des taux de change, la dollarisation, l’inflation élevée et croissante, les problèmes juridiques et financiers liés aux actifs gelés … Il faut faire face à tout ces points pour assurer une reconstruction efficace.
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Interview réalisé par Nathalie Bureau du Colombier en partenariat avec Econostrum lors de la Conference FEMISE de 2017- Photo par Nathalie Bureau du Colombier.
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