Quinze ans après l’accord de Barcelone, la convergence tant espérée entre pays Méditerranéens et Union européenne n’atteint pas vraiment le rythme attendu et nécessaire. Concernant les échanges de biens, les barrières tarifaires et non tarifaires sont encore bien trop imposantes et un long chemin reste à parcourir pour libéraliser les services, notamment ceux liés à la mobilité des personnes.
Peur d’ouvrir ses frontières et de voir son marché national sabré par des produits étrangers moins chers ? Freins politiques ou administratifs ? L’intégration profonde entre l’Europe et les Etats de la Méditerranée, tant souhaitée en 1995, reste à mi-chemin. Une des raisons sans doute au fait que la part de l’Europe dans le commerce méditerranéen a régressé !
« A l’exception des biens manufacturés, nous constatons un ralentissement des échanges avec l’Union Européenne, au moment même où la Chine prend de l’importance. Cependant, il ne faut pas être totalement pessimiste car nous sentons tout de même une amorce de montée en gamme des produits fabriqués. Cette amélioration de la qualité des produits doit se poursuivre avec une mise à niveau du système productif, créateur de valeur ajoutée, et un positionnement sur des niches (habillement, électronique, aéronautique…). L’incapacité des jeunes diplômés à trouver un emploi s’explique par l’inadaptation du système productif », constate Nathalie Roux, chercheur au Centre de recherche en développement économique et Finance internationale (DEFI).
Les pays méditerranéens doivent prendre l’habitude de commercer entre eux
L’écart entre formation et outil de production a atteint son paroxysme en janvier 2010, soulevant la colère de tout un peuple contre l’injustice d’un système à deux vitesses, jetant à terre les 25 années de la gouvernance Ben Ali jugée autoritaire et corrompue.
Contributrice au rapport annuel publié par le Femise « Le partenariat Euro-méditerranéen à la croisée des chemins », l’économiste met en évidence plusieurs explications à l’échec de Barcelone. « La protection des industries locales s’effectue à travers le maintien des barrières tarifaires et, de manière plus discrète, avec des barrières non tarifaires qui n’ont pas été intégrées au processus de Barcelone », explique Nathalie Roux.
Une attitude regrettable, selon elle, puisqu’elle permettrait aux pays méditerranéens d’améliorer leurs processus de production et de se positionner sur le plan international avec des produits conformes aux normes du marché.
Les règles d’origines sont également un frein et la signature d’accords bilatéraux pourraient résoudre ce handicap. Des accords entre Etats permettraient, par exemple, au Maroc d’importer du tissu de Turquie et de réexporter le textile vers l’Europe. Pour y parvenir, les pays méditerranéens doivent prendre l’habitude de commercer entre eux.
La libéralisation des services est également la pierre d’achoppement, que ce soit dans les secteurs de la finance ou des télécoms. En matière agricole, le frein aux importations en Europe de fruits et légumes cultivés au Maghreb bloque tout mécanisme de convergence. « Les barrières très fortes aux produits agricoles empêchent le Maroc de développer ses avantages comparatifs », ajoute Nathalie Roux. Une chose est sûre, l’Europe va devoir accepter de faire sauter des verrous et laisser entrer l’orange maltaise, les dattes, les tomates cultivées dans les pays méditerranéens.
Le « Rapport annuel FEMISE sur le Partenariat Euroméditerranéen », édition 2010, est disponible sur le site du Femise.
Photo Econostrum-NBC
Article de Nathalie Bureau du Colombier, Econostrum. Vous pouvez retrouver la rubrique « Grand Angle » et les articles correspondant à l’adresse suivante : www.econostrum.info. L’inscription à la newsletter d’econostrum est accessible par :http://www.econostrum.info/subscription/