La dixième conférence organisée par l’Institut de la Méditerranée, FEMISE et le Cercle des Economistes, a eu lieu dans les locaux de la Villa Méditerranée le samedi 8 novembre 2014*.
Le rapport réalisé par le FEMISE et financé par la Banque Européenne d’Investissement (BEI) sous le titre : « Économie Sociale et Solidaire : Vecteur d’inclusivité et de création d’emplois dans les pays partenaires méditerranéens », a été presenté et a été le sujet de plusieurs débats durant la journée. (Téléchargez Le rapport)
Introduction
Tous les travaux menés sur la région méditerranéenne montrent que son problème est certes d’avoir une croissance forte mais également plus inclusive. C’est ce dernier point qui aujourd’hui fait défaut que l’on considère la participation aux décisions ou à l’activité au travers de l’emploi. Cette caractéristique de la croissance en Méditerranée touche également la rive Nord qui souffre aussi de taux de chômage (en particulier des jeunes) très élevés et a des difficultés à faire participer ou à intégrer des pans entiers de sa population. Compte tenu des difficultés pour les Etats à assurer la cohérence sociale s’est développée une économie sociale et solidaire dont le but premier n’est pas le profit mais de réinstaller l’humain au cœur de l’économie. Les organismes concernés sont les coopératives, les mutuelles, les associations et les fondations.
Dans un pays comme la France on évalue à 10% du PIB le périmètre de ces activités qui occupent 2,5 millions de salariés (10% des emplois) et représentent 200.000 entreprises. Ces activités ont désormais un cadre législatif et un ministère leur est consacré. Les secteurs concernés sont pour l’essentiel l’action sociale, les activités financières et d’assurance, l’enseignement et la santé. En revanche, le commerce et l’industrie y sont très peu représentés.
Sous réserve d’approfondissement les questions que se poseront les 10èmes RV économiques de la Méditerranée sont les suivantes :
Session inaugurale : Les nouvelles perspectives de l’intégration régionale dans la région euroméditerranéenne, quelles évolutions dans l’organisation ? Quel chemin retenir pour un développement ouvert et résilient dans des sociétés plus inclusives ?
Séance 1 : Le potentiel de l’ESS à s’attaquer aux questions sociétales dans les PM
Il s’agira de discuter sur le rôle que peut jouer l’ESS dans les PM. L’ESS a de l’importance pour les PM car elle peut leur permettre de penser l’économie autrement, proposer un mode de développement socioéconomique qui sera à la fois durable, démocratique et solidaire.
- Premièrement, l’ESS permet d’inclure les groupes exclus, notamment les femmes, dans le processus économique.
- Deuxièmement, la contribution de l’ESS peut être déterminante car elle est fondée sur le développement territorial et la proximité
- Troisièmement, l’ESS est une réponse au manque de diversification économique. On retrouve l’ESS sous plusieurs formes et dans tous les secteurs.
- Quatrièmement, son modèle et ses principes d’entreprise non lucrative (rémunération du capital limitée, excédents mis en réserve etc) signifient une moindre recherche de rentabilité de court terme, une faible exposition aux tractations des marchés financiers.
- Enfin, le contenu des structures de l’économie sociale (assemblée, élection, participation) est une école de valeurs « démocratiques », une alternative aux pouvoirs du modèle autoritaire encore présent des PM.
Séance 2 : Les structures et secteurs concernés par l’ESS dans les PM
L’ESS se structure sous une grande diversité juridique, autour du tissu associatif, coopératif (moins le cas en Tunisie) et du secteur des mutuelles (inexistant en Egypte). En outre, on retrouve certains programmes sociaux spécifiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion fonctionnant sur financement public mais aussi privé. Il s’agit dans cette session de dresser un bilan de l’économie générale de l’ESS dans les PM. Seront présentées les structures principales mais aussi des programmes spécifiques à chaque PM et les « success stories » qui méritent d’être « copiées ».
Un dialogue aura également lieu sur les activités de l’ESS avec un réel potentiel. Généralement il s’agit de celles présentes dans des secteurs liés à l’agriculture et la pêche (Maroc, Egypte, Palestine, Jordanie, Liban et Tunisie), l’éducation et formation, l’intégration sociale et professionnelle, l’habitat (Palestine, Egypte, Maroc), le tourisme et l’artisanat (notamment au Maroc et en Egypte) et le secteur de l’Epargne et du Crédit.
Séance 3 : Les obstacles au développement de l’ESS dans les PM
Seront discutés les besoins exprimés par les acteurs de l’ESS et que l’on retrouve dans diverses études. Ils appellent des réponses concrètes pour :
- Améliorer l’environnement de l’ESS (juridique, politique, législatif, économique et social)
- Faciliter/favoriser la création et l’émergence d’initiatives d’ESS au niveau des régions et territoires grâce, notamment, à des dispositifs d’incubation et d’accompagnement de proximité
- Faciliter l’accès au financement (côté offre et demande)
- Renforcer les capacités des acteurs
- Structurer, organiser et mettre en synergie les acteurs de l’ESS
- Promouvoir et mettre en valeur les produits de l’Economie Sociale et Solidaire
- Faciliter l’accès des produits de l’ESS au marché
- Favoriser l’accès des acteurs de l’ESS aux systèmes de protection et prévoyance sociale
Le développement de l’ESS dans les PM nécessite une intervention sur 3 axes : réglementaire, d’accompagnement et financier. Cette intervention doit se faire au niveau national mais surtout au niveau des régions, les problèmes économiques nécessitant des actions de proximité.
Séance 4 : Quelles outils de réglementation, financement et accompagnement de la structuration de l’ESS ?
La question qui se pose est comment intervenir. Le rôle des bailleurs de fonds internationaux comme la BEI est ici incontournable. La BEI peut faire appel à des projets de développement de l’ESS en incluant les 3 axes prioritaires (un axe d’appui aux politiques publiques pour construire un cadre adapté, un axe accompagnement pour sensibiliser et renforcer les capacités des porteurs de projet et un axe financement pour assurer la concrétisation des projets, les 3 axes réunis permettant une action de long terme).
Seront discutés les moyens possibles d’intervention, via notamment l’innovation financière, comme, par exemple :
- La généralisation d’un système de prêts d’honneur,
- Le développement du « crowdfunding », pour mieux orienter les transferts des migrants
- La création d’une Banque Éthique
- Le lancement d’une grande initiative «Social Impact in Med» qui mettrait en œuvre un plan d’actions partagé entre les parties prenantes mobilisées.
- La création d’une plateforme d’ingénierie de projets.
* Cet évènement est le dernier de la semaine économique de la Méditerranée qui débutera le 3 novembre. Devant le succès de cette manifestation se sont joints aux collectivités initiatrices – Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Ville de Marseille – la Banque Mondiale via le CMI, installé à Marseille, l’OCEMO, la BEI et divers organismes particulièrement orientés vers la région euroméditerranéenne, en particulier, le groupe interministériel 5+5 auprès du Premier Ministre, le Secrétariat Général de l’UPM, etc.